Une dynamique de Transformation impulsée par la Direction chez Sulzer
Sulzer est un groupe suisse de 16.500 personnes qui propose des solutions pour gérer les fluides, quels que soient le fluide, la distance et la pression, de l’industrie lourde à la biotech. Il a été créé en 1834 et entretient depuis une culture industrielle très forte avec un fort contenu technologique. En 2015, Grégoire Poux-Guillaume en est devenu le CEO, avec le mandat de mettre en œuvre un retour à une croissance profitable et durable. Il a rapidement remodelé son Comité Exécutif et a notamment fait venir à ses côtés Armand Sohet au poste de DRH.
Un des éléments principaux qu’identifient rapidement Armand Sohet et le Comex est le décalage flagrant entre la performance de l’entreprise et la performance des individus : suivre très bien un process très compliqué est plus valorisé qu’impacter effectivement la profitabilité de l’entreprise. Il y a urgence à changer l’état d’esprit, les valeurs et les comportements qui mobilisent tous les acteurs de l’entreprise. « Donc il a fallu tout changer depuis la base », constate Armand Sohet. La situation financière de l’entreprise est très critique et la vitesse du changement est un facteur clé. Le Comex décide donc que la transformation viendra du haut.
Armand Sohet jette les bases du nouveau système de valeurs de Sulzer, travaille cette première version avec son équipe RH rapprochée, puis il implique les leaders d’opinion de l’entreprise : « pour que cela devienne le sujet de tout le monde, il faut faire du « good enough » avec beaucoup de monde sur un produit déjà bien abouti pour être efficace ». Le résultat tient sur deux slides, clairs et concis :
La puissance du changement impulsé ne vient pas seulement de la formulation de ce nouveau corpus de comportements. Elle tient aussi de l’incarnation de ce changement dans la vie réelle des employés. Outre les communications très nombreuses du CEO sur le sujet et la mobilisation de tous les membres du Comex comme missi dominici, les équipes de direction ont montré concrètement qu’on pouvait faire les choses autrement : lancement d’un projet « Sulzer in motion » où l’on encourage l’activité physique et on développe un programme de well-being, organisation d’une fête avec un DJ pour lancer une atmosphère différente de travail, « breakfast with the CEO », mise en place de Yammer, développement d’une politique de marque employeur, connexion de l’interne et de l’externe pour se nourrir du meilleur… L’idée est de mobiliser tout le monde, de casser les silos, d’énergiser les équipes, de créer une dynamique nouvelle à l’opposé de la bureaucratie et de la routine. Sur les cartes de vœux de l’entreprise, on met désormais les employés et non plus les turbines.
Cette culture nouvelle permet à Sulzer de sortir la tête haute de deux « stress tests » : le premier en 2018, quand l’existence même du groupe est menacée par la mise au ban des oligarques russes (dont un actionnaire important de Sulzer) par l’administration Trump. C’est la très rapide réaction de Grégoire Poux-Guillaume et de son comex renouvelé qui permettent cette fois d’éviter le pire.
La seconde confrontation de cette nouvelle culture Sulzer avec la réalité est la crise du Covid, comme pour tout le monde. L’agilité de l’entreprise permet alors de déployer avec efficacité des principes et des instructions simples, avec le bon niveau de décision locale. Cette agilité a aussi rendu possible une accélération des actions de développement dans un contexte où la compétence des employés, des managers et des leaders a été cruciale : les programmes pour 1500 personnes en remote ont remplacé les sessions de 15 personnes en présentiel. Pendant la crise du Covid, Sulzer a donc pu continuer son plan d’acquisitions, a encore renforcé sa position sur les marchés et a amélioré ses données financières.
« La culture, c’est aussi des personnes pour l’incarner », précise Armand Sohet. Pendant ces cinq années de changement majeur, les équipes ont changé d’état d’esprit mais quelques personnes aussi ont été changées, pour avoir des équipes plus resserrées capables de travailler en confiance et en autonomie. La confiance supplée aux process inefficaces et permet une accélération de la décision et de l’exécution. Sans leader pour donner la direction, sans managers pour l’incarner, le meilleur pack de valeurs et de comportements n’existe pas :
« La clé c’est l’humain. Le leader doit incarner à part entière les valeurs et le style de l’entreprise. You need to be the change you wish to see ».