En guise d’introduction…

Après une mission 2018 consacrée à l’impératif de réindustrialisation de la France puis une mission 2019 dédiée à l’impact radical de la 4ème révolution industrielle, le cycle triennal « Produire en France au 21ème siècle » de la FNEP se clôt en 2020 par une mission dont l’ambition est d’explorer les solutions pour adapter les organisations de travail des entreprises du secteur industriel aux nouveaux enjeux.

Dès lors, nous avons cherché à déterminer les leviers capables d’adapter l’organisation du travail aux ruptures technologiques et culturelles qui frappent le secteur industriel français. Chemin faisant, nous nous sommes rendu compte que cette préoccupation étant d’autant plus importante dans le contexte de crise sanitaire mondiale que nous avons traversé depuis mars 2020. 

Notre volonté était de trouver les voies qui permettent aux entreprises et aux salariés impactés de faire face aux principaux défis que nous avons identifiés. Nous avions bien conscience que la transformation concernait de nombreux acteurs qu’il convenait d’embarquer. Et face à l’immensité des réponses possibles, nous avons choisi de circonscrire le périmètre de notre étude.

1- Les défis auxquels le secteur industriel est sommé de s’adapter

Le monde bouge très vite, de plus en plus vite. Plusieurs enjeux poussent l’industrie française à se transformer et à se redéployer à la hauteur de ses ambitions :

  • Des enjeux économiques et technologiques : la mondialisation et la 4ème révolution industrielle ont fait émerger un monde en perpétuelle transition avec des modes de production et de consommation sans cesse renouvelés dans une course incessante à la performance. L’automatisation et la robotisation facilitent les tâches mais suscitent aussi des inquiétudes sur le devenir de nombreux métiers et la capacité des salariés et organisations à anticiper les compétences nécessaires. Le rythme accéléré des cycles d’innovation technologique impose en effet à l’entreprise d’actualiser presque en temps-réel ses connaissances pour rester compétitive et attractive. Si la nécessité économique pour une entreprise de s’adapter pour perdurer n’est pas nouvelle, dans un monde devenu VUCA (volatile, incertain, complexe, ambigüe), l’organisation du travail est sommée de ne pas rester figée et l’organisation doit devenir véritablement apprenante.
  • Des enjeux humains, sociétaux et environnementaux : en réaction à ce contexte et face à la préoccupation croissante de l’impact social et environnemental de l’activité humaine, on assiste à un retour de la recherche de sens et de valeurs. L’organisation du travail doit aussi répondre aux aspirations profondes des individus, d’autant qu’avec la disparition des réseaux de solidarité traditionnels, le travail devient l’un des ciments de la cohésion de la Cité. Ces enjeux axiologiques questionnent notre modèle de contrat social dès lors que l’engagement et la fidélisation sont ouvertement conditionnés à l’existence de ces valeurs, et qu’il n’est plus envisagé de travailler seulement pour le salaire. Le défi pour les organisations est désormais de concilier leurs objectifs propres et ces aspirations sociales et sociétales.
  • Des enjeux spécifiques au monde du travail et à l’industrie en particulier : la montée de ces aspirations, pour partie générationnelles, a accompagné un changement profond du tissu entrepreneurial ces 50 dernières années et une désaffection pour les métiers de l’industrie. Conserver ou reconstituer un réseau d’entreprises locales, plus « modernes », et à plus forte valeur ajoutée, est pourtant un facteur fondamental de cohésion sociale, comme le montrent les initiatives de retour au « made in France ».
  • Des enjeux humains et culturels de formation et d’employabilité : si l’entreprise, pour durer, doit gagner de l’argent et garantir un certain niveau de performance, elle doit dans le même temps respecter ses salariés et les personnes et entités avec lesquelles elle interagit. Le défi à relever est dès lors également le développement de la polyvalence, la prise en compte des questions de qualité de vie au travail et de rythme de travail, l’engagement des salariés, la modularité des carrières et, de manière plus générale, l’employabilité. Une entreprise ne survit que si ses collaborateurs sont compétents, reconnus, alignés avec des objectifs clairs et investis dans leur réalisation.

2- Des acteurs divers intéressés par la transformation du secteur industriel

Les questions d’adaptation des organisations du travail ne sont pas spécifiquement françaises et le contexte dans lequel elles sont posées varie selon les pays et leurs traditions étatiques et économiques, comme l’a montré Max Weber. Le moyen de faire vivre et collaborer les entreprises, l’Etat et les individus est fortement modelé par ces traditions… et leur effacement dans certains cas.

Cela implique d’aborder le terme « organisation du travail » de manière large, avec tous les acteurs impliqués et parties prenantes. Adapter l’organisation du travail ne se fait pas sans que l’ensemble de ces acteurs réfléchissent ensemble et prennent en compte les outils à disposition. Chacun doit jouer sa partition dans un ensemble qui doit être harmonieux et où chacun se retrouve gagnant. Ainsi, pour orchestrer un nouvel équilibre entre les différentes attentes des acteurs et les objectifs de performance économique et industrielle, c’est aussi en tant qu’individus que ces acteurs doivent eux-mêmes s’adapter.

3- La crise du COVID a rebattu les cartes

Au moment du déclenchement de la crise sanitaire, face à un enjeu de survie personnelle et collective, chaque entité a dû drastiquement prioriser son plan de charge et désigner les activités à maintenir en s’appuyant, quand elle en était dotée, sur son plan de continuité d’activités (PCA). La crise a d’ailleurs été un excellent stress test de ces PCA. L’essentiel s’est ainsi rapidement distingué de l’accessoire dans chacune des organisations. 

Dans certains secteurs, la possibilité même de poursuivre l’activité a été remise en cause : pour les entités concernées, il ne s’agissait pas de s’adapter à un enjeu nouveau mais simplement de sauver ce qui pouvait l’être.

A bien des égards, la crise a été le révélateur de grandes problématiques sociales et sociétales. En ce qui concerne spécifiquement la capacité des organisations à s’adapter (à supporter l’incertitude constante de la situation : confinement, déconfinement, reconfinement etc.), la crise a parfois mis cruellement en lumière un manque de préparation, une lourdeur des procédures et l’absence d’outils concrets face à la disruption. 

La résistance de certaines entités à cette pandémie puis leur capacité de résilience semblent reposer à la fois sur des choix passés d’organisation qui ont garanti la capacité à produire ou à réinventer rapidement un business, sur une conduite du changement qui est parvenue à embarquer tous les collaborateurs, sur une culture et des valeurs préexistantes sur lesquelles ces entités ont pu s’appuyer et sur une forte capacité d’adaptation des collaborateurs.

Déjà identifié, le besoin de développement des « softs skills » est un des enseignements forts au sortir de cette crise. Le management à distance a souvent accru l’autonomie des salariés et la capacité des managers à faire confiance. Les compétences molles s’avèrent cruciales pour faire face aux enjeux de performance dans un cadre où porosité entre vie professionnelle et vie personnelle se renforce (question de l’impact du télétravail sur les organisations et les individus largement évoquée dans la presse spécialisée) et où le rapport au travail, à l’atelier et au bureau s’en trouve considérablement modifié. 

Si notre étude et nos propositions ne se réduisent pas à la crise que nous avons traversée, elles en portent les stigmates ! Elle a en effet poussé les organisations à s’adapter, se transformer, bien plus vite qu’elles ne l’auraient fait dans un autre contexte… Un laboratoire à ciel ouvert pour notre mission !

4- Le périmètre de l’étude : une ambition à circonscrire

L’objet de notre mission, comme celui des deux précédentes, est le secteur industriel français dans un sens assez étendu : depuis les PME, qu’elles aient ou non un marché à l’export, jusqu’aux grands groupes cotés en bourse à rayonnement international. Sont incluses les grandes entreprises industrielles à capitaux publics ou semi-publics, comme les entreprises privées de toute taille.  

Nous avons fait le choix de nous appuyer sur des exemples issus de nos propres expériences professionnelles et des contacts que nous avons noués avant et pendant la mission, les exemples qui nous sont apparus les plus prometteurs sur le seul champ, déjà très vaste, de l’adaptation de l’organisation du travail.

Mais nous ne sommes pas interdits de nous appuyer aussi sur des exemples issus d’autres secteurs que l’industrie : nous avons regardé des solutions portées par des acteurs dont l’ancienneté dans le paysage économique et la taille diffèrent, actifs dans plusieurs secteurs économiques mais aussi dans le monde associatif ou gouvernemental. En effet, la « servification » galopante de l’industrie incite autant à regarder les stratégies des nouveaux entrants dans le secteur tertiaire que sont les pure players, ces acteurs économiques nés avec la révolution numérique et qui en maîtrisent tous les codes, que celles des groupes anciens qui doivent faire face eux aussi, avec cette révolution, à des défis d’adaptation proches de ceux du secteur industriel stricto sensu. 

Nous nous sommes aussi autorisées de larges « pas de côté » en allant regarder par exemple ce que les sciences du vivant ont à apporter à la réflexion sur les modèles d’organisation ou en faisant une incursion dans le monde de la recherche académique : celui des sciences sociales appliquées ou non à l’industrie et en particulier celui de la recherche sur la sociologie des organisations. Il convient toutefois de préciser que nous ne sommes pas penchées plus avant sur l’étude des mécanismes théoriques régissant les interactions des acteurs selon la science des organisations ou selon les typologies dégagées par la science du management comme par exemple celle de Gareth Morgan. Nous avons préféré relever des exemples concrets de ces sciences du travail, qui sont déjà mis en pratique par les organisations ou qui nous ont semblé prometteurs.

Au gré de nos lectures, rendez-vous, interviews, discussions, il nous est apparu que le facteur humain était au cœur de l’adaptation des organisations du travail aux nouveaux enjeux. C’est donc lui qui a guidé en grande majorité nos choix dans les exemples proposés…

A vous à présent de découvrir les cinq piliers de l’adaptation de l’organisation du travail que nous avons explorés !

Le monde bouge très vite, de plus en plus vite. Plusieurs enjeux poussent l’industrie française à se transformer et à se redéployer à la hauteur de ses ambitions : 

  • Des enjeux économiques et technologiques : la mondialisation et la 4ème révolution industrielle ont fait émerger un monde en perpétuelle transition avec des modes de production et de consommation sans cesse renouvelés dans une course incessante à la performance. L’automatisation et la robotisation facilitent les tâches mais suscitent aussi des inquiétudes sur le devenir de nombreux métiers et la capacité des salariés et organisations à anticiper les compétences nécessaires. Le rythme accéléré des cycles d’innovation technologique impose en effet à l’entreprise d’actualiser presque en temps-réel ses connaissances pour rester compétitive et attractive. Si la nécessité économique pour une entreprise de s’adapter pour perdurer n’est pas nouvelle, dans un monde devenu VUCA (volatile, incertain, complexe, ambigüe), l’organisation du travail est sommée de ne pas rester figée et l’organisation doit devenir véritablement apprenante. 
  • Des enjeux humains, sociétaux et environnementaux : en réaction à ce contexte et face à la préoccupation croissante de l’impact social et environnemental de l’activité humaine, on assiste à un retour de la recherche de sens et de valeurs. L’organisation du travail doit aussi répondre aux aspirations profondes des individus, d’autant qu’avec la disparition des réseaux de solidarité traditionnels, le travail devient l’un des ciments de la cohésion de la Cité. Ces enjeux axiologiques questionnent notre modèle de contrat social dès lors que l’engagement et la fidélisation sont ouvertement conditionnés à l’existence de ces valeurs, et qu’il n’est plus envisagé de travailler seulement pour le salaire. Le défi pour les organisations est désormais de concilier leurs objectifs propres et ces aspirations sociales et sociétales.
  • Des enjeux spécifiques au monde du travail et à l’industrie en particulier : la montée de ces aspirations, pour partie générationnelles, a accompagné un changement profond du tissu entrepreneurial ces 50 dernières années et une désaffection pour les métiers de l’industrie. Conserver ou reconstituer un réseau d’entreprises locales, plus « modernes », et à plus forte valeur ajoutée, est pourtant un facteur fondamental de cohésion sociale, comme le montrent les initiatives de retour au « made in France ». 
  • Des enjeux humains et culturels de formation et d’employabilité : si l’entreprise, pour durer, doit gagner de l’argent et garantir un certain niveau de performance, elle doit dans le même temps respecter ses salariés et les personnes et entités avec lesquelles elle interagit. Le défi à relever est dès lors également le développement de la polyvalence, la prise en compte des questions de qualité de vie au travail et de rythme de travail, l’engagement des salariés, la modularité des carrières et, de manière plus générale, l’employabilité. Une entreprise ne survit que si ses collaborateurs sont compétents, reconnus, alignés avec des objectifs clairs et investis dans leur réalisation.